Vie de l’Uepal

L’Europe, une chance !

24 avril 2024

Pour évaluer les enjeux des prochaines élections européennes, la Caspe – présidée par Fabienne Rubach –, a mandaté certains de ses membres parmi lesquels Jean-François Collange, Pierre Greib, Robert Hertzog, Jean-Luc Sadorge et Gilbert Vincent. Réflexion en sept points.

Le 9 juin prochain les électeurs désigneront dans les 27 États de l’Union européenne leurs représentants au Parlement européen qui, pour cinq ans à venir, incarneront leurs aspirations et défendront leurs intérêts dans les politiques européennes. Ils pourront ainsi exprimer pleinement leur rôle de citoyens européens en décidant de la composition de cette assemblée délibérative, pas toujours bien connue par l’opinion mais aux pouvoirs importants et qui est garante du caractère démocratique des institutions européennes grâce à des députés élus au suffrage direct. Nous sommes citoyens de la commune, de la région, de l’État et de l’Europe ; à chaque fois il faut se déterminer en fonction d’enjeux spécifiques et des compétences effectives de l’organisme concerné sans se laisser détourner par des propagandes de campagne souvent simplistes, voire falsificatrices. Seule l’Europe nous permet de négocier les grands enjeux planétaires (climat, sécurité, migrations, énergie, alimentation) à égalité avec les autres puissances internationales. Il n’y aura pas plus de technocratie dans la gouvernance européenne que dans celle des États dès lors que les parlementaires représentent véritablement des citoyens conscients de leurs responsabilités européennes et s’investissent pleinement dans leur fonction.

Deux conditions doivent être réunies pour cela. La première est que les électeurs participent nombreux au scrutin afin de conforter la légitimité de l’assemblée et d’y exprimer toutes les sensibilités. La seconde est que ces électeurs choisissent des délégués avec lesquels ils partagent valeurs et convictions en fondant leur choix sur les programmes européens des candidats, dûment étudiés, et non sur des considérations de politique française ou des arguments très éloignés des compétences réelles du Parlement européen.

 

Pourquoi vouloir être européen ?

Il est crucial de comprendre que l’identité européenne va bien au-delà d’une simple reconnaissance géographique. C’est un appel à s’engager dans la construction d’un avenir collectif, nourri par une réflexion sur notre histoire passée et nos valeurs fondamentales.

Cependant, nous devons faire face à une tendance troublante de critiquer l’Europe sans réellement comprendre son essence. Oublier qu’elle fut un projet audacieux, forgé sur les cendres des guerres et des divisions nationales, c’est risquer de compromettre notre avenir commun. La mémoire courte est un rappel constant des ravages causés par l’ignorance et l’égocentrisme. La question cruciale est de savoir si l’Europe peut nous protéger de ces sombres réalités. La réponse réside dans notre conscience citoyenne. Celle-ci exige une compréhension profonde de nos valeurs et traditions communes. De la tradition judéo-chrétienne aux idéaux des Lumières, ces fondements philosophiques et éthiques ont nourri notre parcours européen. Il est temps de redécouvrir ces principes. Libérés de la peur de l’autre, nous pouvons construire un monde dont la confiance mutuelle et l’hospitalité sont les piliers. L'’élargissement de notre horizon culturel et la coopération internationale deviennent des impératifs pour surmonter les défis contemporains.

La critique constructive, fondée sur une argumentation solide et la relecture de notre histoire, est essentielle pour contrer les discours populistes et xénophobes. L’espoir, non la peur, est le moteur de la lucidité et du courage, qualités indispensables pour être un citoyen digne de ce nom.

 

Pourquoi voter ?

Les mutations économiques, sociales, écologiques, démographiques et technologiques de ces dernières décennies posent à notre continent des défis considérables. Les conflits aux portes de l’UE pourraient remettre en question 75 années pendant lesquelles un conflit entre les pays membres était devenu impensable. Face à ces défis, aucun pays ne peut trouver seul les solutions. Le projet européen fondé sur le débat démocratique permet d’aborder l’avenir avec une force plus grande. Nous devons réaffirmer par notre vote qu’avec nos ressources et nos intelligences mises en commun, l’avenir se construira, les valeurs et la paix seront défendues.

 

Climat : passons enfin à l’action !

L’année 2023 a battu tous les records : elle est de loin l’année la plus chaude jamais enregistrée. Pourtant, face à cette réalité et à toutes les catastrophes climatiques que notre planète a connues cette année, nous vivons une période de bascule avec des injonctions contradictoires : malgré les engagements qui avaient été pris en 2020, faut-il faire une pause, voire revenir en arrière sur le Pacte vert européen comme le demandent notamment certains agriculteurs ? Assurément non : pour limiter le réchauffement à 1,5° C, il est impératif de cesser dès maintenant et d’urgence tous les investissements dans les énergies fossiles. C’est évidemment possible : toutes les solutions sont sur la table et nous n’avons plus aucune raison de procrastiner. Le sujet est planétaire. La réponse ne peut venir que d’une politique volontaire et ambitieuse pilotée à l’échelle européenne : surtout ne détricotons pas le Pacte vert !

 

Respect de l’État de droit et hospitalité

Appuyés sur la Déclaration des droits de l’Homme de 1948 et des conventions qui en garantissent le respect effectif, les fondateurs de l’UE ont uni des démocraties reconnaissant l’État de droit comme garant des libertés fondamentales. Ces bases posent les limites qu’une majorité, même légalement élue, ne peut transgresser. Peuplée au cours des siècles par des populations venues d’horizons divers, l’Europe ne peut se penser comme forteresse assiégée. Pour ceux qui, arrivés récemment, cherchent une protection contre l’oppression et une vie meilleure, l’hospitalité est une exigence forte. Les députés doivent faire respecter ces principes au bénéfice de tous ceux qui résident sur le continent.

 

Paix et sécurité

« Bonheur à ceux qui vont nous survivre et goûter la douceur de la Liberté et de la Paix. » Ces paroles du résistant Manouchian Massak à son épouse Mélinée, la veille de son exécution par les forces des ténèbres en février 1943, rappellent que Paix et Liberté ne sont jamais simplement données mais se doivent d’être toujours protégées et promues… jusqu’au sacrifice s’il le faut. Le peuple ukrainien en témoigne, à sa manière, plus que jamais aujourd’hui encore. À l’abri de ces courages assumés, enfants d’une Europe libre et en paix – mais menacée –, il nous revient de ne pas laisser mourir par négligence et facilité ce que tant d’abnégations et d’efforts nous ont généreusement donné.

 

L’Europe à Strasbourg

L’Europe est dans le cœur des Alsaciens et des Mosellans, qui la vivent au quotidien. Ils ont d’autant plus de raisons d’aller voter le 9 juin qu’ils y désigneront les représentants français au Parlement européen qui a son siège et tient ses sessions à Strasbourg. Capitale de trois organisations européennes, cette ville symbolise, par son histoire et sa culture, la paix sur le continent, l’humanisme, la démocratie et l’État de droit, qui sont aussi des valeurs du protestantisme, dont nous avons aujourd’hui besoin plus que jamais. Le Parlement européen est un acteur important pour leur promotion sur le continent et pour leur mise en œuvre effective. Mettons nos votes en accord avec nos attentes et besoins en choisissant nos élus en parfaite connaissance de cause.

 

Espérance

Mais où est donc passée, en ce début de xxie siècle, l’espérance ? Crise climatique menaçante, retour de guerres dévastatrices, emprise insidieuse d’épidémies retrouvées, bouleversements continus… où trouver dignité et courage de faire face à l’avenir ? Il se pourrait pourtant que l’espérance véritable (dont Charles Péguy assurait qu’elle étonnait Dieu lui-même) – à l’encontre de ce que ne cessent de seriner les mirages de slogans et de publicités étourdissants – ne tient pas dans le scintillement de miroirs trompeurs. C’est du creux même de la souffrance et du malheur assumés et surmontés que naît la « petite fille espérance » ; c’est sous la Croix endurée que point – si près et si loin ! – la lumière de Celui qui vient et redonne vie à ce qui semblait mort à jamais.

Commission des affaires sociales, politiques et économiques de l’Uepal

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